Bernard Schmid
Ce qui est presqu’étonnant, c’est qu’il a tenu si longtemps : le mouvement d’occupation de places publiqus, « Nuit debout », a fêté les 100 jours de son existence, samedi 09 juillet 2016 sur la place de la République, à Paris. Il était né à partir du 31 mars, formant une composante du mouvement de protestation contre la « Loi travail ». Certes, depuis le lundi 11 juillet, il n’y a plus de rassemblement officiel de « Nuit debout » sur la place parisienne, parce qu’il n’y a plus de déclaration en préfecture pendant la période estivale. Le 31 août, ce sera à nouveau le cas, alors que des membres de « Nuit debout » continuent de travailler ensemble de façon plus informelle, en attendant.
Depuis la fin juin 2016, les grèves ont reflué. C’est aussi lié au fait que des salarié-e-s grévistes ont subi des pertes de salaire sèches, parfois de plusieurs semaines. Pour la première fois à une échelle aussi massive, des caisses de solidarité ont été créés pour organiser la solidarité financière avec les grévistes. L’intersyndicale, composée de sept organisations et qui avait organisé les treize « journée d’action » successives depuis le 09 mars jusqu’au 05 juillet 2016, appellera à son tour à de nouvelles mobilisations qui auront lieu le 15 septembre prochain.
Le 23 juin dernier, la manifestation de la dixième « journée d’action » avait d’abord été interdite par le gouvernement, à Paris. C’était une première depuis la fin de la guerre d’Algérie. Autorisée après un tollé dans la presse, elle a cependant dû se tenir sur une distance qui ne dépassait pas 500 mètres, avant de faire demi-tour et de revenir à son point de départ : la place de la Bastille. Le trajet total était d’un kilomètre et demi. Surtout, la place de la Bastille – lieu du début et de la fin de la manifestation – était entourée par un fort dispositif policier, placé en cercles concentriques autour de la place. Les participant-e-s devaient passer pas moins d quatre cordons de CRS et de gendarmerie mobile et accepter de faire fouiller leurs affaires. Plus de 80 personnes ont été interpellées ce jour-là à Paris, et 113 à l’échelle nationale, souvent simplement pour avoir été en possession de lunettes de plongée ou d’autres protections contre les gaz lacrymogènes.
Les 28 juin et 05 juillet, lors des deux « journées d’action » suivantes, la Bourse du travail de Paris – située au 3, rue Château d’Eau a été cerné de forces de police qui maintenaient à l’intérieur des centaines de personnes, désireuses de se rendre collectivement à la manifestation. Les autorités les soupçonnaient de vouloir participer aux « cortèges de tête » des manifestations, qui, pendant le mouvement social du printemps 2016, se plaçait souvent devant le carré de tête officiel et dont la composition est plus jeune. Pendant une certaine durée, personne ne pouvait sortir de la Bourse du travail, alors qu’à d’autres moments, ne pouvaient sortir que les personnes qui acceptaient de se faire fouiller individuellement.
En tout et pour tout, le mouvement du printemps 2016 aura aussi été un laboratoire pour des nouvelles politiques répressives du gouvernement français.
Bernard Schmid, juriste et journaliste à Paris